Kamila Valieva a fait ses débuts olympiques en février 2022 et a séduit le monde avec son programme court sur In Memoriam de Kirill Richter. La jeune athlète est apparue en Une des journaux internationaux en devenant la première femme de l’histoire à réussir un quadruple saut sur la scène olympique. D’ailleurs, elle n’en a pas réussi qu’un, mais deux (pendant le libre), ainsi qu’un magnifique triple axel rippon.

Cependant, ses exploits et la médaille d’or du ROC (comité olympique russe) sont actuellement remises en question suite aux révélations faites par un site internet américain, le jour des programmes longs féminin du tournoi par équipes. La jeune prodige aurait échoué les tests de dopage et ne serait pas en mesure de confirmer la médaille d’or du ROC dans le tournoi par équipes.

Valieva aurait échouée au test de dopage des Jeux Olympiques 2022

Le premier article d’Insidethegames.biz, site américain pro américain, donnait peu de détails mais assurait avoir des preuves. La rumeur s’est très vite répandue et tous les médias ont annoncé que la jeune femme était dopée avant d’avoir l’intégralité des informations.

Après quelques jours tumultueux, les détails ont été révélés.

Regarder les faits

Kamila a été testé positive en décembre 2021 quelques jours avant les championnats nationaux de Russie. La substance à laquelle elle a été testé positive est effectivement interdite par le CIO et l’ISU, mais n’est pas interdite en Russie. L’enjeux majeur ici est donc la date ! Kamila a été testée positive le 19 décembre 2021 donc après la fin des étapes du Grand Prix et avant le championnat national russe. Les athlètes russes peuvent concourir avec la trimétazidine dans le sang. Donc juridiquement, aucun scandale ici.

Le site américain a découvert cette information à cette période mais a choisi de la taire. La saison a continué et Valieva a remporté les championnats nationaux, puis les européens en janvier 2022. En février, soit deux mois après le test positif, les jeux olympiques 2022 ont commencé avec le tournoi par équipes.

Kamila a rayonné dans ses deux programmes, le court sur ‘In Memorian » et le Boléro de Ravel. Ses prestations ont tellement impressionné par leur maturité, leur grâce et leur technique que l’ensemble des patineurs américains a applaudi ces performances. Pourtant, rappelons que la tension politique entre la Russie et les Etats-Unis était à son comble à ce moment-là.

Retournement de situation

Au moment de la remise des médailles, le temps a semblé long et certains journalistes ont évoqué des possibilités de dopage au sein des gagnants. Peu après, le site américain a publié un article à charge contre Kamila Valieva, relevant le test positif de dopage mais en omettant de préciser que ce test était vieux de deux mois et que ce résultat n’était pas celui des tests de Beijing.

L’ensemble de la presse a repris cette information sans la questionner, ni la vérifier et rapidement, tous les médias ne parlaient plus que de ça, la jeune sportive russe « dopée, manipulée, utilisée ». Les réseaux sociaux de cette jeune athlète ont explosé et le harcèlement en ligne a commencé. En un article orienté, l’entièreté de son travail et de ses exploits a été remis en question.

Les médias ont rapidement spéculé sur l’ensemble de la situation et tous les scénarios ont été proposés : athlète qui se dope parce qu’elle a trop de pression, athlète qui est droguée à son insu, athlète privée de sa famille, de sa jeunesse et utilisé pour le rayonnement politique russe, preuve que tous les Russes se dopent etc.

Considérer un cas de dopage est légitime

Prendre en considération cette information est, bien entendu, normal. Mais il faut souligner que le site aurait dû révéler cette information avec une date des faits. Omettre ce point a porté préjudice non seulement à Kamila Valieva, mais aussi à l’équipe russe et aux russes qui redevenaient le symbole du dopage dans le sport. Et il apparaît évident que cette information n’a pas été omise mais a été cachée pour être instrumentalisée pendant les Jeux. Sinon pourquoi attendre deux mois pour la révéler ?

La diffusion de cette information a été orientée et à chercher à nuire directement à l’athlète et, bien entendu, accentuer la division entre les occidentaux et les pays non-dominants sur l’échiquier politique.

Exploitant la situation difficile de la jeune athlète à des fins politiques et de propagande géostratégique, la campagne médiatique américaine visant à diffamer Valieva comme une « tricheuse russe » a été rapidement incorporée dans les « informations » pro-guerre auxquelles la population américaine et européenne est actuellement soumise.

Dans ce contexte, le test positif de Valieva est une tragédie pour la jeune prodige qui est discrédité à présent dans le sport, mais cela a été une aubaine incroyable pour les propagandistes de guerre que constituent une partie des médias américains.

Instrumentalisation des informations

Au lieu de parler des exploits des patineurs russes, qui depuis 2014, dominent l’ensemble des compétitions (hors hommes), on observe que l’opinion publique a été orientée en utilisant le quatuor gagnant : athlète, russe, mineur, dopage. Sans chercher à connaître les faits dans leur ensemble.

Il est important de rappeler également qu’à la fin des Jeux, de nombreux athlètes, dont des patineurs artistiques espagnols et anglais ont été attrapés pour dopage. Or, de ces athlètes, nous n’avons jamais entendu parler. De tous les athlètes testés positifs, d’aucuns n’ont fait la une des journaux internationaux, le sujet n’a même pas été abordé dans les médias qui avaient alors relaté l’affaire Valieva sans relâche.

Régulièrement depuis, des articles paraissent sur les avancées et non avancées des recherches sur le supposé dopage de Valieva, mais rappelons que la jeune fille est toujours mineure et est protégée par la loi. Et que donc, ces informations ne peuvent pas être diffusées à tout va.

Le manque de légitimité étasuniens

Quand on brandit l’étendard des droits des enfants, il semble alors judicieux de ne pas les instrumentaliser en retour. Cet article ne vise pas à nier que la jeune athlète était sous dope car nous n’avons pas encore les résultats définitifs. Cela ne vise pas non plus à nier la gravité qu’est le problème du dopage dans le sport. En revanche, l’objectif est de dénoncer le harcèlement sous prétexte de défendre une « bonne cause ». Le harcèlement reste du harcèlement. Et le justifier sous prétexte de « noble cause » est particulièrement pervers.

Rappelons que les célèbres athlètes telles que Simone Biles, Serena et Vénus Williams, Elena Delle Donne, Justin Gatlin ont des autorisations spéciales d’usage à des fins thérapeutiques (AUT) de substances dopantes depuis l’enfance qui leur permettent de ne pas être discrédité.

En 2016 après le piratage de l’Agence Mondiale Antidopage, Simone Biles avait expliqué sur Twitter être atteinte d’ADHD (trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) et prendre un traitement depuis qu’elle était toute petite à base de méthylphénidate et pipéridines (amphétamines). Ces dernières étant reconnues comme substances psychostimulantes notamment utilisées chez les cyclistes.

Une grande partie des athlètes américains dopés revendiquent des problèmes de trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité… Cette masse de jeunes américains avec trouble de déficit de l’attention devrait questionner. Il y a bien lieu, ici, de voir un scandale d’Etat passé sous silence.

Rappelons également que le 23 juillet 2021, le président de l’Agence mondiale antidopage (AMA) Witold Banka expliquait vouloir travailler étroitement avec les Etats-Unis, « mais souhaite que les sports américains se soumettent plus largement aux règles internationales antidopage », a-t-il confié à l’AFP.

Sans parler du Rodchenkov Act qui est entré en vigueur le 4 décembre 2020. Cette nouvelle loi, validée par le Sénat américain, doit criminaliser hors des frontières tout responsable d’un système de dopage portant atteinte aux intérêts des sportifs américains. Évidemment, il faut pénaliser « tout responsable d’un système de dopage » mais « portant particulièrement atteinte aux intérêts des sportifs américains » ? Tout le problème est bien là. On ne fait pas de lois à visée internationale pour ses propres intérêts. On propose des lois pour réguler le sport international pour le bien des athlètes et du grand sport.

La partie émergée de l’iceberg

Les Américains dotés du précieux certificat de traitement à visée thérapeutique peuvent donc concourir sans se soucier de ce qu’ils s’injectent.

Ces athlètes ont échoué à TOUS les tests de dopage depuis quasiment le début de leur carrière. Aussi, si l’on prend la logique américaine, cela n’est que purement et simplement, du dopage d’état, du dopage protégé par l’état américain.

Alors, allons-nous priver Simone Biles, Serena et Vénus William de leurs médailles et exploits ? Allons-nous condamner les États-Unis à participer aux compétitions internationales sans hymne, ni drapeau ? Allons-nous condamner les États-Unis pour dopage d’État ?

Rédigé par

Delph Toltsky

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