Quand le patinage bouscule les codes de la féminité !

Alexandra Trusova devient la première athlète de patinage artistique (tous genres confondus) au monde à effectuer cinq quadruples sauts lors d’un programme libre.

Eteri Tutberidze, coach russe, continue de révolutionner le patinage. Elle propose depuis presque 10 ans, des patineuses de plus en plus complètes. Même en tutu, ses athlètes proposent des programmes de plus en plus difficiles, exhaustifs, challengeant le patinage féminin ET masculin.

Certains s’amusent à dire qu’Eteri Tutberidze élève une armée !

Lors des derniers JO d’hiver (Pyeongchang -2018), Alina Zagitova a créé la surprise en réalisant l’ensemble de ses sauts en deuxième partie de son programme libre. Les sauts réalisés en seconde partie reçoivent chacun un bonus de 10 %. Les jambes étant fatiguées, il devient plus difficile d’atterrir les sauts en fin de programme. Faire l’ensemble de ses sauts en fin de partie a permis a Zagitova de devenir la seconde plus jeune championne olympique de patinage artistique, au grand dam des étasuniens.

Bien qu’Alina soit actuellement en pause, Eteri ne manque pas de compétitrices. Certains s’amusent à dire qu’elle élève même une armée ; entre Alexandra Trusova, Anna Shcherbakova, Aliona Kostornaia, Kamila Valieva, Maia Khromykh, Daria Usacheva et Sofia Akatyeva, il devient quasiment impossible aux étrangers de se faire une place sur les podiums internationaux. Sans parler des autres patineuses russes entraînées par Alexei Mishin (Elizaveta Tuktamysheva) et Evgueni Plushenko (Veronika Zhilina).

Lors des sélections russes pour les JO de Beijing, c’est ni un, ni deux, ni trois, ni quatre, mais cinq quadruples sauts qu’Alexandra Trusova a atterri, 2 quadruples lutz,1 quadruple flip, 1 quadruple salchow, 1 quadruple boucle piqué, sans parler d’un combo (quad + triple ) et d’un cantilever. 

Trusova a choisi de casser les codes et de bousculer les représentations de la féminité

Alors qu’il est moins demandé aux hommes de mettre en avant le sens artistique de leur patinage, les femmes restent coincées dans ce modèle. C’est ce que nous avions pu constater pendant la période Surya Bonaly par exemple. Plus athlétique que ses comparses, la médaille d’or aux JO lui est plusieurs passé sous le nez. Alexandra Trusova propose depuis de nombreuses années, des programmes athlétiques plutôt qu’artistiques, ce qui lui a été plusieurs fois reproché. Mais maintenant, avec un programme aussi impressionnant (aucune femme, aucun homme n’a atterri 5 quads en un programme), il est impossible de ne pas la compter aux jeux olympiques et encore moins de lui reprocher le manque artistique. Son score sera déjà tellement haut, qu’elle a toutes les chances de largement décrocher l’or.

Cela explique peut être le choix des paroles de la chanson. Sur une version heavy metal de « Cruella de Vil » diffusée par les haut-parleurs de l’arène, Trusova enchaîne les sauts :

« You’re stuck in the past
And I’m ahead of the game.   

A life lived in penance, it just seems a waste
And the devil has much better taste
And I tried to be sweet, I tried to be kind
But I feel much better now that I’m out of my mind« *

Et termine avec une mimique facétieuse… Faisant un pied de nez aux russes, aux américains, aux asiatiques en montrant qu’elle peut être artistique et « féminine ». Mais elle a choisi de casser les codes et de bousculer les représentations de la féminité. 

*Traduction des paroles de la chanson:

« Vous êtes coincé dans le passé
Et je suis en avance dans le sport

Une vie vécue en pénitence, c’est du gâchis.
Et le diable a bien meilleur goût
Et j’ai essayé d’être douce, j’ai essayé d’être gentille.
Mais je me sens beaucoup mieux maintenant que je n’ai plus de limites. »